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Les types d'interfaces narratives

L’interface n’est pas un habillage. C’est le langage de votre narration interactive. Benjamin Hoguet identifie 8 types d’interfaces narratives qui structurent différemment l’expérience du spectateur.

Chaque type correspond à une intention créative et à un type de récit spécifique.


Définition : L’interface présente plusieurs choix visuels à l’écran. L’utilisateur clique pour avancer dans le récit.

Caractéristiques :

  • Choix clairement matérialisés
  • Alternance temps de choix / temps de consommation
  • Interface “menu-driven”

Intérêt narratif :

  • Matérialise la liberté offerte
  • Marque le temps du choix (pause dans le récit)
  • Familier pour le public (grammaire du jeu vidéo)

Enjeux et risques :

  • Risque de “syndrome menu de DVD” (choix qui cassent l’immersion)
  • Nécessite une scénarisation forte des moments de choix
  • Donner assez d’informations pour que le choix soit éclairé

Exemples :

  • Jeu d’influences (2013)
  • Lifeline (2015)
  • Late Shift (2016)

Définition : L’utilisateur fait défiler verticalement ou horizontalement une séquence d’animations et d’événements.

Caractéristiques :

  • Mouvement vertical ou horizontal
  • Chorégraphie linéaire de contenus
  • Geste naturel et quasi-inconscient

Intérêt narratif :

  • Permet une chorégraphie précise (comme un montage)
  • Donne le contrôle du rythme à l’utilisateur
  • Combine linéarité et interaction

Enjeux et risques :

  • Fatigue oculaire si trop long
  • Nécessite une fluidité technique parfaite
  • Créer une sensation de contrôle (pas juste “tourner les pages”)

Exemples :

  • Phallaina (2016)
  • NSA Files: Decoded (2013)
  • Do Not Track (2015)

Définition : Les événements de l’histoire sont présentés chronologiquement. L’utilisateur navigue dans le temps.

Caractéristiques :

  • Organisation chronologique explicite
  • Navigation temporelle libre
  • Dates comme structure

Intérêt narratif :

  • Construit un récit sur une chronologie précise
  • Montre des relations de causalité
  • Donne le contrôle du temps au spectateur

Enjeux et risques :

  • Peut se réduire à un énoncé de dates (froid, non-narratif)
  • Difficile de raconter une histoire avec “juste des dates”
  • La conception linéaire du temps n’est pas universelle

Exemples :

  • I Love Your Work (2014)
  • Stains, beau pays (2014)

Définition : Plusieurs flux vidéo/contenus coexistent à l’écran. L’utilisateur active l’un ou l’autre.

Caractéristiques :

  • Opposition visuelle immédiate
  • Basculement entre contenus
  • Multiples perspectives simultanées

Intérêt narratif :

  • Matérialise une opposition (points de vue, temporalités, lieux)
  • Grammaire familière (split screen au cinéma)
  • Permet la comparaison directe

Enjeux et risques :

  • Couper un contenu pour voir l’autre = rupture d’immersion
  • Le lien entre les contenus doit être évident
  • Risque de confusion cognitive (trop d’infos simultanées)

Exemples :

  • Gaza / Sderot (2012)
  • Alma (2013)
  • Wei or Die (2015)

Définition : Un ensemble d’options visuelles (vignettes, cartes, objets) parmi lesquelles l’utilisateur choisit son point d’entrée.

Caractéristiques :

  • Entrées visuelles multiples
  • Stimule la sensibilité visuelle
  • Subdivise l’expérience en modules

Intérêt narratif :

  • Permet des expériences courtes et modulaires
  • Donne le contrôle de l’ordre de découverte
  • Approche non-linéaire intuitive

Enjeux et risques :

  • Risque de simple “menu avec images”
  • Trop de choix simultanés = paralysie
  • Donner assez d’infos pour motiver le choix

Exemples :

  • The And (2015)
  • L’Atelier du Peintre (2015)
  • Choose Your Own Documentary (2015)

Définition : L’utilisateur déambule librement dans un espace 3D. La narration est environnementale.

Caractéristiques :

  • Exploration spatiale libre
  • Grammaire du jeu vidéo
  • Monde ouvert ou semi-ouvert

Intérêt narratif :

  • Sensation de liberté maximale
  • Narration environnementale (l’espace raconte)
  • Vision moins dirigiste de la narration

Enjeux et risques :

  • Difficile de guider sans diriger
  • Complexité technique (3D, performances)
  • Comment raconter si l’utilisateur ne va pas où prévu ?

Exemples :

  • Life is Strange (2015)
  • Bear 71 (2012)
  • Journey (2012)

Définition : Une carte géographique sert de hub de navigation. Les contenus sont géolocalisés.

Caractéristiques :

  • Géographie comme structure
  • Contenus géolocalisés
  • Dimension spatiale claire

Intérêt narratif :

  • Ancre le récit dans un territoire réel
  • Valorise les contenus géolocalisés
  • Référence commune pour tous (la géographie)

Enjeux et risques :

  • Esthétique souvent froide (Google Maps)
  • Les cartes créent une distance (pas d’immersion)
  • Difficulté de raconter une histoire avec une carte seule

Exemples :

  • Riding the New Silk Road (2013)
  • Génération What ? (2016)
  • Fort McMoney (2013)

Définition : Des gestes inhabituels (swipe, pinch, draw, shake…) créent l’interaction narrative.

Caractéristiques :

  • Gestes physiques variés
  • Approche ludique
  • Interaction instinctive (pas rationnelle)

Intérêt narratif :

  • Décolle l’interaction d’une décision rationnelle
  • Crée une connexion émotionnelle par le geste
  • Approche expérimentale/artistique

Enjeux et risques :

  • Trouver le geste qui sert vraiment l’émotion
  • Estimer le niveau de dextérité requis
  • Risque de gadget si le geste n’est pas signifiant

Exemples :

  • Five Minutes (2014)
  • Sortie en Mer (2015)
  • Swap Tales (2016)

TypeContrôle utilisateurFamiliaritéComplexité techniqueIdéal pour
Point-and-ClickMoyen⭐⭐⭐Choix narratifs clairs
ScrollableTempo⭐⭐⭐⭐⭐Long formats, chorégraphies
TimelineTemps⭐⭐Récits chronologiques
Écrans partagésPerspective⭐⭐⭐⭐Oppositions, multi-POV
GaleriesOrdre⭐⭐⭐Expériences modulaires
Environnements 3DEspace⭐⭐⭐⭐⭐Exploration, immersion
CartesGéographie⭐⭐⭐Contenus géolocalisés
GestuellesVariable⭐⭐Expériences émotionnelles

1. Quelle est la première chose que je vois ?

Section titled “1. Quelle est la première chose que je vois ?”

L’interface doit être immédiatement compréhensible.

Bon exemple - Do Not Touch :

  • Vous voyez un personnage + votre curseur
  • Instinct : approcher le curseur
  • Pas besoin d’explication

2. Mon interface a-t-elle besoin d’un tutoriel ?

Section titled “2. Mon interface a-t-elle besoin d’un tutoriel ?”

Si oui : Votre interface est peut-être trop complexe.

Solutions :

  • Simplifier l’interface
  • Intégrer le tutoriel dans la narration
  • Utiliser des conventions familières

3. Le signal et le feedback sont-ils efficaces ?

Section titled “3. Le signal et le feedback sont-ils efficaces ?”

Signal : Comment j’indique qu’un élément est interactif ? Feedback : Comment je confirme que l’action a été enregistrée ?


L’utilisateur doit toujours savoir :

  • Où il est dans l’expérience
  • Combien il reste à explorer
  • Comment revenir en arrière

5. Mon interface reste-t-elle cohérente ?

Section titled “5. Mon interface reste-t-elle cohérente ?”

Cohérence visuelle : Même style graphique partout
Cohérence fonctionnelle : Mêmes gestes = mêmes résultats
Cohérence narrative : L’interface sert le propos


Je veux que le public explore librement → Galeries, Environnements 3D, Cartes

Je veux contrôler le rythme narratif → Scrollable, Point-and-Click

Je veux montrer des temporalités → Timeline, Écrans partagés

Je veux créer une émotion par le geste → Interfaces gestuelles


Linéaire → Scrollable
Élastique → Point-and-Click + Scrollable
Concentrique → Galeries
Parallèle → Écrans partagés
Embranchements → Point-and-Click
Constellation → Cartes, Environnements 3D


  • MM3B : Identifier le type d’interface de chaque œuvre
  • RTMF1M : Concevoir l’interface de votre projet

Source : Ce concept est développé par Benjamin Hoguet dans sa présentation “La narration interactive” (2017).